Le 8 janvier 2024, la Haute Autorité de Santé (HAS) a annoncé l’accès précoce et sécurisé à l'Endotest. Grâce à ce test salivaire, les femmes présentant des symptômes d’endométriose pourront désormais obtenir un diagnostic rapide et clair. Une avancée majeure pour la médecine, mais coûteuse pour les femmes qui devront débourser entre 500 et 1000e pour y avoir recours...
“Le temps”, voilà ce qui était jusque-là proposé aux 10% des Françaises atteintes d’endométriose. Louise Dugast est l’une d’elles. Après 3 longues années d’errance médicale remplies d'échographies, d’IRM et de prises de sang, la jeune étudiante en journalisme a enfin obtenu son diagnostic. Elle qui s’était réjouie que d’autres n’est plus à subir le même parcours qu’elle, se dit aujourd’hui “choquée” face au prix à débourser : “ça me révolte en tant que patiente, peu de gens ont les moyens pour ça et ne seront pas diagnostiqués faute d’argent. C’est une maladie aussi importante que les autres.”
Pour Bertille Flory, patiente experte, ce tarif s’explique par trois facteurs : le prix de l'innovation, une proposition et une diffusion encore trop timide du test et finit par défendre son efficacité économique expliquant qu’il palliera sûrement l’errance médicale vécue par les femmes, souvent durant de longues années.
Cette errance médicale qui a un coût : celui des dépassements d’honoraires des consultations et examens et celui de l’Assurance Maladie qui ne prend pas en charge tous les frais médicaux liés à cette maladie. Alors si on assemble tout ça de bout en bout, on comprend que certaines puissent se laisser convaincre par l’efficacité de l’Endotest. Et même si pour Louise, celui-ci n’aurait pas pu être une option à cause du prix, Bertille aurait, elle, été prête à investir pour avoir une réponse “rapide et claire” et ainsi éviter 19 ans d’errance médicale.
Magalie, infirmière pour le parcours endométriose du CHU de Nantes s’étonne, quant à elle, du manque de réaction de la part de ses patientes face à l’arrivée de l’Endotest. Estimant qu’elles ne sont “soit pas renseignées, soit qu’elles ont toutes notion qu'aujourd'hui, il n’y a toujours pas la reconnaissance ni la prise en charge.”
“Dix ans de médecins qui leur disaient d’aller voir des psys”
“La patiente qui arrivait dans un centre endométriose avant, avait en général 10 ans d’errance médicale. Dix ans de médecins qui leur disaient que c’était dans la tête, que c’était autre chose…d’aller voir des psys.”, souligne Magalie. Alors oui, les mentalités ont bien évolué. Tous estiment que cela repose avant tout sur la formation des sages-femmes et médecins. Au niveau des Pays de la Loire, où travaille Magalie, ces derniers sont désormais initiés à transférer plus aisément les dossiers des patientes lorsqu’ils arrivent en limite de compétence. Elle avoue également qu’à cause des difficultés à repérer les lésions aux examens, “30% des (ses) patientes ne sont pas étiquetées” mais sont tout de même soignées avec “un traitement équivalant à celui de l’endométriose, si les doléances et symptômes correspondent à ceux de cette maladie chronique”. “Notre but premier, c’est de les soulager et d’éviter une évolution de la maladie.” ajoute-t-elle.
L'association EndoFrance, s’accorde sur le sujet du manque de formation des médecins jugeant que “si certains professionnels disent encore, on nous le rapporte, que l'endométriose est une maladie à la mode, c'est justement qu'ils ne font pas l'effort de se former pour comprendre les différentes formes d'endométriose et l'impact possible sur le quotidien des personnes qui en souffrent.”
Vers une meilleure prise en charge de l’endométriose ?
“Lorsque j'ai appris l'existence de ce test, je me suis dit que la recherche avançait enfin sur l'endométriose et que la cause de la santé des femmes était mieux prise en compte par la science. Parce qu'il faut dire que l'immense majorité des études scientifiques médicales sont réalisées sur les hommes. Ce qui fait que la santé féminine n'est pas suffisamment comprise et considérée. Alors l'endométriose, encore moins…”, se réjouit Bertille. Il est vrai qu’un diagnostic n’est jamais anodin, puisqu’il permet de mettre un mot sur des maux du quotidien comme le souligne Magalie : “le diagnostic, c’est une reconnaissance de leur mal-être, de leurs douleurs, de leurs impossibilités d’aller au travail, de leur impossibilité quelquefois d’avoir une vie sociale, d’avoir une vie sexuelle, de mener à bien leurs études. Donc pour elles, cela légitime toutes les douleurs qu’elles ont pu avoir, souvent depuis leur adolescence.” car comme le précise EndoFrance, “dans certaines formes d'endométriose, on parle de handicap invisible…”.
Cependant, dans le cas des adolescentes présentant des symptômes d’endométriose, le diagnostic était moins évident car leurs imageries sont souvent moins révélatrices de la maladie. C’est pour cela que l’association EndoFrance, agréée par le Ministère de la Santé, voit en l’Endotest un réel potentiel, souhaitant notamment “la poursuite des études qui permettraient son élargissement à des cibles spécifiques.” Elle précise également avoir “toujours basé son discours sur les recommandations de la Haute Autorité de Santé” et se voit “ravie que des études complémentaires soient proposées pour valider définitivement ce test”.
Ecrit par Pauline Guilcher