En France, environ 2,5 millions de femmes sont atteintes d’endométriose. Cette maladie gynécologique chronique, longtemps ignorée, touche 1 femme sur 10 en âge de procréer, soit près de 190 millions de femmes dans le monde selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Pourtant, malgré son impact sur la vie quotidienne et professionnelle des patientes, l’endométriose reste difficile à diagnostiquer et à traiter. L’errance médicale moyenne est de 7 ans en France, un retard qui aggrave la prise en charge et la souffrance des patientes. En ce mois de mars, consacré à la sensibilisation à cette pathologie, professionnels de santé et associations redoublent d’efforts pour briser le silence et alerter sur l’urgence d’une meilleure reconnaissance médicale et sociale.
Les causes floues et méconnues de l’endométriose
L’endométriose se caractérise par la présence de cellules semblables à l’endomètre (muqueuse utérine) en dehors de l’utérus. Ces cellules, sensibles aux variations hormonales, provoquent des inflammations, des douleurs et des lésions sur divers organes comme les ovaires, la vessie ou l’intestin.
Les causes exactes de la maladie restent incertaines. Les chercheurs avancent plusieurs hypothèses, dont la théorie du reflux menstruel, où le sang des règles remonterait dans la cavité abdominale, favorisant l’implantation de cellules utérines ailleurs dans le corps. Un dérèglement immunitaire empêcherait aussi l’organisme d’éliminer ces cellules anormales. Des études récentes ont montré que l’endométriose pourrait également être liée à un déséquilibre du microbiote intestinal, ce qui expliquerait les troubles digestifs fréquemment rapportés par les patientes.
L’hérédité est également suspectée : une femme dont la mère ou la sœur est atteinte d’endométriose a 5 à 7 fois plus de risques de développer la maladie. Par ailleurs, l’exposition aux perturbateurs endocriniens, présents dans les plastiques, cosmétiques ou pesticides, pourrait jouer un rôle dans l’inflammation chronique et l’aggravation des symptômes.
Les symptômes de l’endométriose
L’endométriose est une maladie complexe qui se manifeste différemment selon les patientes. Dans certains cas, elle est asymptomatique. Mais pour d’autres, elle entraîne des douleurs intenses et persistantes, particulièrement pendant les règles (dysménorrhée), les rapports sexuels (dyspareunie) ou encore lors de la digestion et de la miction.
Outre la douleur, les troubles digestifs, urinaires et la fatigue chronique font partie des symptômes les plus courants. La maladie est également une cause fréquente d’infertilité : entre 30 et 50 % des femmes concernées rencontrent des difficultés à concevoir, ce qui en fait l’une des premières causes d’infertilité féminine.
Une étude menée en 2021 par l’Inserm a montré que près de 40 % des patientes souffrent de dépression ou d’anxiété, conséquence de la douleur chronique, de la fatigue et du manque de reconnaissance médicale et sociale de leur condition.
Un diagnostic complexe qui ralentit la prise en charge
L’un des principaux défis de l’endométriose reste son errance diagnostique. En moyenne, il faut entre 6 et 8 ans avant qu’un diagnostic soit posé. Ce retard s’explique par la banalisation des douleurs menstruelles et le manque de formation des professionnels de santé sur cette pathologie.
Le diagnostic repose principalement sur l’échographie pelvienne et l’IRM, mais ces examens ne permettent pas toujours de détecter toutes les formes d’endométriose. Dans certains cas, une cœlioscopie exploratrice, un examen chirurgical invasif, est nécessaire pour observer les lésions.
En 2024, une avancée majeure a été annoncée : le développement de tests salivaires et sanguins permettant une détection plus rapide et moins invasive. Ces tests, actuellement en phase d’étude clinique, pourraient réduire considérablement l’errance médicale et améliorer la prise en charge des patientes.
Une mauvaise prise en charge de l’endométriose
Il n’existe pas de traitement curatif contre l’endométriose. La prise en charge repose sur la gestion des symptômes à travers des traitements hormonaux, des antalgiques ou, dans les cas les plus sévères, la chirurgie. Les pilules contraceptives et les dispositifs intra-utérins hormonaux sont souvent prescrits pour limiter la progression des lésions. Mais ces traitements ne sont pas toujours efficaces et comportent des effets secondaires lourds.
La chirurgie, notamment la cœlioscopie, permet d’enlever les lésions les plus invalidantes, mais la maladie récidive dans près de 50 % des cas après 5 ans. Un suivi médical régulier est donc essentiel pour limiter la progression des lésions et adapter les traitements.
En 2022, la France a lancé un Plan national pour l’endométriose, visant à structurer un parcours de soins spécifique et à améliorer la formation des professionnels de santé. Cependant, seules 10 % des patientes bénéficient aujourd’hui d’une prise en charge adaptée, selon les associations de patients.
Un impact sur la vie quotidienne et professionnelle
L’endométriose a des conséquences bien au-delà des douleurs physiques. Selon une étude de l’INSERM, plus de 70 % des femmes concernées déclarent que la maladie a un impact négatif sur leur vie professionnelle. Les crises de douleurs, la fatigue chronique et les arrêts maladie répétés compliquent l’insertion et le maintien dans l’emploi.
Un rapport du Sénat publié en 2023 a révélé que près de 30 % des femmes atteintes d’endométriose ont déjà dû changer de métier ou réduire leur temps de travail à cause de la maladie.
Sur le plan personnel, l’endométriose affecte également la vie sociale et intime. Certaines femmes doivent renoncer à des activités sportives, limiter leurs déplacements ou revoir leur alimentation pour limiter l’inflammation. La stigmatisation et le manque de reconnaissance médicale renforcent l’isolement des patientes, qui se battent souvent seules contre cette maladie invisible.
Depuis 2023, l’endométriose est reconnue comme une Affection de Longue Durée (ALD), permettant une prise en charge partielle des soins. Toutefois, les patientes réclament un remboursement intégral des traitements et une meilleure reconnaissance du handicap invisible que représente cette maladie.
Certaines entreprises commencent à mettre en place des congés menstruels, mais cette initiative reste marginale. Les associations demandent la généralisation de ces mesures pour permettre aux patientes de mieux gérer leurs crises douloureuses sans mettre en péril leur emploi.
Mars : mois de sensibilisation de l’endométriose
Durant tout le mois de mars, des actions sont organisées pour briser le tabou autour de l’endométriose. Conférences, événements solidaires et témoignages de patientes permettent de mieux informer le public et de faire pression sur les pouvoirs publics pour obtenir des avancées concrètes.
L’objectif est clair : faire de l’endométriose une priorité de santé publique et permettre à des millions de femmes de bénéficier d’un diagnostic rapide et d’une prise en charge adaptée. Prochaine échéance: faire de cette maladie la grande cause national de 2026, affaire à suivre !
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Écrit par Laure ROUSSELET
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